Archive pour la catégorie Général

Six gouttes d’eau dans l’océan

mardi 18 mars 2008

À la demande conjointe de GroM et d’Erasoft à sa suite, six choses insignifiantes.

J’ai pleuré à chaque rupture (d’un côté comme de l’autre).

J’ai pleuré au cinéma. La scène de l’accouchement de Justine, dans MR73. Comme chaque fois. Un film, un documentaire tourné dans une maternité, effet garanti. (J’ai pleuré en musique aussi, bien souvent, en écoutant Ma chouette.)

J’ai pleuré à l’Église quand je connaissais celle qu’on allait porter en terre. J’ai pleuré aussi quand je ne la connaissais pas et que la petite fille serrait fort ma main.

J’ai pleuré dans le schuss à cause de la vitesse et du vent dans mes yeux. Alors j’ai acheté un masque.

J’ai pleuré dans une cabine téléphonique de la caserne de Blois en annonçant à µ que j’étais déclaré apte au service national.

Sidéré, hébété. Je n’ai pas pleuré ce matin de novembre d’il y a seize ans. E. en a même pris peur.

Les six premiers lecteurs de cette note prendront le relais.

Comme elles disent

jeudi 28 février 2008

L’une ne veut pas croire que je suis un mauvais garçon.
L’autre m’explique que je ne sais pas écouter, pas donner signe de vie, ni donner des nouvelles. Ou en prendre. Et dépose un baiser sur mes lèvres.
L’une rit que dans le bar mon regard vagabonde sur la brune au pull rouge de la table à côté. Joue à surprendre mon regard.
L’autre note que laisser mon regard glisser sur la brune à lunettes de la table à côté, vraiment, je ne devrais pas. Essaie de me consoler de toutes les vérités dures qu’elle sait qu’elle peut me dire.
L’une dépose un baiser sur mes lèvres.
L’autre voudrait me serrer dans ses bras.
L’une file au matin.
L’autre s’en va.

Et moi je reste là. Je ne sais pas qui j’attends.

Purée de pois

mercredi 27 février 2008

Veuillez me pardonner cette interruption temporaire de nos émissions. Je m’en voudrais de vous (oui, vous, là, je sais qu’il y en a qui lisent !) servir la bouillie parano-misérabiliste qui me démange le bout des doigts les soirs de grande lassitude, alors je préfère laisser mon petit carré de bitume en jachère. On verra bien quelle folie le printemps arrivera à y faire pousser.

Les montagnes russes

dimanche 10 février 2008

Ça semblait avoir bien commencé. De son regard elle m’a fait exister. De ses lèvres elle m’a emporté. Elles avaient un goût de menthe fraîche. Je m’étais confié, c’est une merveille, elle, et j’en tombe amoureux. C’était bien et terrible de réapprendre l’attente anxieuse d’un signe. Se rappeler la douleur exquise de l’être qui vous manque. Elle m’a emmené plus haut et plus bas que là où d’autres depuis si longtemps…

Mais elle n’a pas laissé à l’embrasement soudain le temps de la brûler. Pas même le temps de l’effrayer. J’ai l’impression qu’on a rien à se dire m’a-t-elle dit avant de m’avoir donné le temps de parler. Ça m’a fait mal comme rarement auparavant. Je ne suis pas prête à faire des efforts, à être disponible…

– Tant pis pour moi, alors…
– Tant pis pour nous.

La diva

samedi 2 février 2008

Elle faisait l’ouverture de la soirée « Cabaret ». Mixité, métissage, le folklore lusophone, le hip-hop parisien et le conte d’Afrique noire se donnaient rendez-vous. Le rideau s’est ouvert, elle est entrée en scène.

Le regard bien caché dans l’ombre de son panama, elle chantait presque juste sur les instrumentaux enregistrés par d’autres, ces accompagnements faits pour durer plus long mais qu’on coupe avant terme en fade out absurde. On applaudissait pourtant. Au moins pour l’effort de la prestation.

Un nouveau morceau commence. Elle engage le public à frapper dans ses mains. Trop tôt, trop vite. « Allez, tout le monde, avec moi ! » La mayo prend mollement. On y va pour la forme, plus pour lui faire plaisir qu’autre chose. La salle est loin d’être déchaînée.

D’un coup sa voix s’étiole. Encore davantage. S’étrangle dans une quinte. De toux. Elle s’excuse, c’est fini. Au milieu de son tour, elle abandonne la scène et la lumière des projecteurs. Sans doute ce public-là n’était-il pas assez bien pour elle.

Au moins, le spectacle continue.

Parcours chaotique d’une particule

mercredi 23 janvier 2008

C’est la nuit.

Voile d’ombre et de froid sur la ville. Laisser la chaleur derrière, au ventre des maisons et aux boyaux de la terre. Il faut de l’erre pour que l’âme tranche ses paupières cousues. Se rince l’œil de pluie fine et glacée.

Il baise comme il respire et il respire plus fort, suffoque de trop de vent glacé. L’amant pressé, le souffle court, court vers des corps à l’envers du décor.

Il y a un avant derrière et un après devant. Il court sans savoir s’il s’empresse vers l’un, s’il s’enfuit de l’autre. Au fond il court sur place, incertain d’où.

La particule… Et l’âme hante, erre… Sens ? à voir. Où elle va.

Relaps

mercredi 9 janvier 2008

Dans l’ombre au loin une plainte.

Pas un cri qui déchire l’obscurité. À peine le bruit d’une larme qui coule le long d’une joue. Cela suffit.

J’étais résolu à n’en plus vouloir, mais on ne choisit pas. C’était l’heure du sommeil passée d’un bon moment, et je me suis assis. Je l’ai laissée tout doucement m’ouvrir le tiroir sombre des angoisses qui lui nouaient le ventre.

— Bon, raconte-moi. Qu’est-ce qui ne va pas ?

Une nuit encore j’ai écouté.