Cela fait maintenant deux semaines que le gaz est coupé.
Le réveil vient juste de m’arracher du sommeil. Je titube hors du lit, encore tout au souvenir de la douce chaleur de sous la couette. Dehors, l’aube est grise.
Le parquet de la chambre craque un peu sous mes pas. Puis le carrelage froid. L’air est glacé sur ma peau nue quand j’entre dans la salle de bain. L’éclat cru, impitoyable de la lumière électrique me hurle dans les yeux, m’arrache à la nuit et me appelle pour un jour encore la condition de celui qui va vivre.
J’entre dans la baignoire. Je sais ce qui m’attend. Je ne veux pas y aller, pas tout de suite, pas encore. J’attends une seconde ou deux. Je vole un minuscule répit.
Il faut pourtant le faire. C’est comme ça, pas le choix. J’ouvre le robinet. Ça y est, l’eau coule. Je passe la main sous le jet froid pour me convaincre de ce dont je suis déjà sûr. Nulle magie ici, nul défi à la thermodynamique. Je sais par cœur maintenant que ça ne va pas être agréable.
Sur les pieds, sur les jambes, elle griffe, elle saisit. Mais ce n’est que désagréable, ce n’est pas pire qu’une douleur soudaine à laquelle on s’est préparé. Sur les bras, elle mord, elle déchire, elle serre encore. Mais ce n’est encore que souffrir.
Alors je mouille mon sexe, mon ventre, mon dos. Et je manque m’évanouir, à chaque fois. Ma respiration se bloque, je la force à repartir, précipitée, désespérée. Je cherche l’air, je l’aspire aussi fort que possible, je me saoûle de lui pour supporter le froid et je sens un voile noir qui tombe sur mes yeux.
Je coupe l’eau. Le gel douche n’a pas du tout la même texture quand la peau est transie, dure de chacun des muscles qui frissonnent en-dessous. Je ne sens presque plus mon corps. Seulement cette impression pénétrante de froid à l’intérieur de moi. Le rinçage même est moins pénible, tant je ne perçois plus rien.
La serviette éponge est douce. Elle paraît presque tiède.
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