18 août 2008
Sous la passerelle de la Grange-aux-Belles.
L’eau du canal bouillonne, tourbillonne. Le sas aval se vide, le petit bateau de plaisance va passer. La sonnerie retentit et les barrières s’abaissent.
C’est cet instant-là que j’attends. Dans l’air calme du soir, le pont va bouger. Et alors il fait un bruit sourd et profond, qui vient de loin. Quand il se met en branle, c’est comme le cri d’une grande bête sauvage.
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14 août 2008
C’est quand je ferme le bureau tard. Comme ce soir. Parti après vingt-deux heures, parce qu’il y avait des trucs urgents à régler.
C’est juste au moment où j’éteins les dernières lumières, où je ferme les dernières portes. Je vais me retrouver dans le couloir éclairé seulement par les blocs de sécurité, une faible lueur orange de loin en loin. Angoisse sourde, toujours à cet instant où tout est silencieux et que je marche, vite, vite, vers la sortie. C’est la peur ancestrale, l’intuition chevillée aux tripes que quelque chose est tapi là, dans l’ombre, prêt à me sauter sur le dos.
Vite, vite, avoir l’esprit clair. Gagner la porte, tapoter le code de mise en service de l’alarme. J’ai trente secondes pour sortir. La porte se referme derrière moi, le palier est éclairé. Pour cette fois encore, je suis en vie.
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3 août 2008
On pouvait voir sur le trottoir un loubavitch à trottinette avec une kippa sur la tête.
Un papa sur son vélo rouge avec ses enfants sur leurs vélos rouges en train de griller un feu rouge.
Un téléphone mobile volant.
Un téléphone mobile atterissant à grand fracas sur le bitume noir.
Des morceaux de téléphone mobile broyés sous les roues des voitures.
Une blonde qui attend, et puis qui n’attend plus. Elle fait une bise à une brune.
Un promeneur qui profitait de la douceur du soir. Avant la pluie.
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30 juillet 2008
Lundi soir.
La journée a été chaude. Épuisé par la soirée et la nuit d’avant. Je ne sais pas comment, mais j’ai réussi à dénicher une dernière étincelle de motivation pour aller nager. Eau fraîche et claire de Cour des Lions, et retour en Vélib’. C’est une jolie lumière déclinante, un début de soir d’été, tiède.
Je geeke un peu, toutes fenêtres ouvertes, et c’est là qu’elle arrive. Dehors c’est sombre et l’eau, ça y est, s’abat sur la ville. Je cours à la fenêtre grande ouverte. Le ciel est clair-obscur, les phares des voitures et les feux de circulation jouent sur le miroir d’eau. Le sol est noir, brillant. Elle passe, sur le trottoir d’en face, dans sa petite robe d’été. Trempée, elle s’en fout. Je hume avec délice l’odeur de bitume mouillé. J’aime l’orage d’été.
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20 juillet 2008
Nous sommes nés au siècle dernier. Un peu avant l’ère Mitterrand. Nos parents avaient rêvé le grand soir en balançant des pavés contre les flics. Pour eux, les années fac, ç’avait été manifs et barricades, AG, occupations. Pour eux et puis pour nous, qui étions à venir, ils avaient rêvé une vie merveilleuse.
Quand on était gamins, l’an deux mille c’était encore lointain, et on se laissait croire aux immeubles de verre et aux voitures qui volent. On n’imaginait pas qu’à vingt-cinq ans de là, l’herbe et le bois des arbres et les gargouilles de pierre des églises gothiques, les statues de tuffeau des chapelles bretonnes, bouffées par les embruns, et les façades miteuses des vieux bouges de quartier attendraient patiemment qu’on atteigne l’âge d’homme. L’enfance était sans fin et les années si longues qu’on n’en voyait pas le bout, trop occupés de nos chagrins d’école.
Et puis nos pas nous ont portés au seuil du siècle, et c’est là qu’on a su la lenteur du monde. Dans les rues de Paris comme le long des trottoirs défoncés de Broadway, au pied du Millennium Hotel, au détour d’une vieille devanture décatie, il y avait toujours ces bistros éternels où des générations de bocks ont culotté le comptoir qui pègue toujours un peu. C’est là que nous avons fini tant de nuits et que nous en terminerons d’autres encore. Avec une belle d’un soir cueillie ici ou là, peut-être chez une amie commune ou au hasard des rues, de la fortune urbaine. Une de ces étrangères qui vient entre nos draps pour quelques heures encore, repousser jusqu’à l’aube la nostalgie aiguë de nos amours passées et de nos illusions.
Nous avons besoin d’elles, la foule de nos amantes. Notre besoin de consolation est impossible à rassasier.
* * *
Écrit à l’invitation d’Akynou sous la contrainte de cinq titres proposés par Madeleine. J’ai un peu perdu de vue l’autre moitié de la consigne : Et parler de vacances. On dira que ma tête y était déjà.
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13 juillet 2008
Bien sûr, avec un nom pareil, c’était pas gagné. Pour devenir célèbre, pour goûter au devant de la scène, jouir de l’éblouissement des spotlights, il lui faudrait ramer. Elle s’appelle… Pamela Pouète. Mais elle en veut, rien ne l’arrête, ni embûches, ni propositions indécentes…
Découvrez-la dans la dernière création de deux jeunes, brillants, talentueux auteurs-compositeurs (que les plus fidèles d’entre vous ont déjà vus à l’œuvre) : Casting, une comédie musicale piano-jazz-vocale intimiste et drôle. Elle sera créée dans le cadre du Prix Découverte du festival des Musicals de Paris, les mercredi 16, vendredi 18 et samedi 19 juillet à 21:30, jeudi 17 à 19:30 et dimanche 20 à 17:30 au Vingtième théâtre[]
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9 juillet 2008
Enfin, à la fenêtre. Le voisin de quelques étages au dessus est toujours généreux quand il arrose ses jardinières. On croirait le bruit d’une vraie pluie d’orage.
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