Archive pour la catégorie Général

Une connaissance aperçue sur le quai du RER

dimanche 15 octobre 2006

C’était l’autre soir, je rentrais du spectacle. J’avais salué l’ami qui m’avait invité, félicité les acteurs pour leur prestation, peu de temps mais beaucoup de travail, cela avait payé.

Je ne m’étais pas attardé. Pas la force d’essayer de socialiser, plutôt l’envie de fuir très vite cette sensation aiguë de n’avoir personne à qui parler. J’avais sauté dans le PC Porte de Versailles, au milieu de la foule du Salon de l’Auto, comme un corps étranger et silencieux brinquebalé dans la marée humaine. Plongé dans mon bouquin jusqu’à la Cité U.

Arrivé là, je venais d’arriver sur le quai du RER quand elle est passée devant moi. Je l’aurais reconnue du coin de l’œil. Je me suis arrangé pour regarder ailleurs le temps qu’elle me dépasse.

J’aurais pu la saluer, ç’aurait été urbain, papoter de tout et de rien, prendre des nouvelles des uns et des autres que sans doute elle continue de voir chaque semaine et que j’ai perdus de vue. Mais j’étais bien trop las pour chercher laborieusement quelque bon résumé de mes derniers mois. Elle n’aurait pas manqué de s’enquérir, bien sûr : « Et toi, tu deviens quoi ? Tu fais quoi, en ce moment ? »

Et rien ne m’effraie plus que ce genre de question. Je me sens faible et vide quand je me sens tenu d’avoir une vie passionnante. Je n’aurais pas pu l’émerveiller, qui voyage sans arrêt, intrépide et fantasque, jamais à court de rencontres improbables. Réfugié dans ma bulle de silence, j’ai préféré la laisser filer sans faire de bruit.

L’homme qui voulait manger le temps

vendredi 13 octobre 2006

À pas pressés lundi, après une lourde journée de reprise, après le week-end, pour arriver au bord de l’eau et faire mille six cent mètres et des poussières contre la montre.

Mardi pour ne pas être trop en retard à la répétition de la chorale, pour attraper la note et tâcher d’apprivoiser les rythmes diaboliques des arrangements jazz.

Mercredi avec hâte pour retrouver les potes autour d’une bonne bière tant que c’est happy hour.

Jeudi, soir de Monop’, il faut bien manger aussi de temps en temps. J’ai faim, envie de rentrer, alors je ne traîne pas.

Vendredi à vingt heures il faudra que je sois à l’autre bout de Paris, pour voir jouer Koltès.

D’un jour à l’autre je traverse Paris en tous sens, le temps plein comme un œuf par terreur d’en manquer. Sans jamais ralentir sauf parfois un instant pour suivre du regard une belle inconnue dont je croise la route.

L’aube du dernier jour

jeudi 5 octobre 2006

J’ai ajouté une rose à mon bouquet de fleurs fanées. Au Rendez-vous des amours mortes, je lui ai offert un café. Elle l’a allongé de larmes car les âmes que l’on blesse saignent ces ruisseaux d’eau claire, chaude et un peu salée.

Une fois encore je l’ai serrée contre moi, et ma gorge s’est nouée de cette douceur dernière. J’ai fui bien vite rejoindre l’air du matin blafard, avec entre les lèvres des bouts de chanson triste. C’était ça ou garder tout le matin en bouche l’amertume vicieuse du bonheur passé.

J’ai marché seul, sans liens, envolé de plus belle. D’une plume mélancolique, de nouveau j’écris ton nom, Liberté.

Motown bar

dimanche 1 octobre 2006

Le vin de soif est frais. On n’est que quatre ou cinq clients dans la salle – un soir de semaine, et déjà vingt-trois heures, mais on arrive à peine. Le chanteur de rock plaisante avec nous. Il allume sa clope avant d’entamer le prochain morceau. Parfois il part en live, et alors on risquerait de ne plus s’entendre mastiquer, dans le petit resto presque désert.

La lumière est douce, tamisée. Elle baigne la salle de taches colorées. La musique aussi emplit le silence d’ombres chaudes. Derrière la vitre, les enfants du soir papillonnent encore. C’est l’heure douce de septembre.

Motown bar, 81, boulevard de Strasbourg, à la sortie du métro Gare de l’Est. On peut y dîner à toute heure de la nuit.

Un livre avec une petite carte

dimanche 10 septembre 2006

Vendredi matin, j’entrais dans mon bureau comme beaucoup d’autres matins. Avé, avé, gais compagnons ! lançai-je comme souvent à mes trois cobureaux. J’avançai dans la pièce et remarquai les papiers inhabituels à ma table de travail. Une livraison avait dû arriver ce matin.

Une surprise, en fait.

Je n’avais rien commandé récemment. Ni pour moi, ni pour le travail. Et d’ailleurs quand je commande pour moi, je ne demande pas de papier cadeau. Sur la petite carte collée à l’emballage argenté, pas de mots. Juste un sourire. 🙂. À l’intérieur un livre, une histoire belle et tragique dont les tout derniers mots sonnent l’espoir des hommes tant qu’ils demeurent en vie[1].

Sur la fiche jointe, juste un prénom et un nom que je ne connaissais pas. Pendant plusieurs minutes je suis resté sans voix, déconcerté, ému de ce présent venu d’un inconnu.

Merci C.


  1. Électre de Jean Giraudoux, disparu de ma wishlist Amazon un matin de septembre 2006.

L’arrache-corps

vendredi 1 septembre 2006

Où l’auteur s’embarque dans des pérégrinations vélocipédiques qui expliquent, a posteriori, son silence de ces derniers jours.

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Rosa, rosa, rosace

dimanche 20 août 2006

Depuis que j’ai emménagé, elle était là. Elle ornait le plafond du salon. Enfin, quand je dis « ornait »… Je me comprends… Je ne critique pas, cela dit. Tous les goûts sont dans la nature. Toujours est-il que la rosace en faux staff (et vraie mousse de polyuréthane) se trouvait là, collée, hideuse verrue au beau milieu de mon plafond tout blanc.

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