Faire réduire à feu vif
Un après-midi de mai, l’un des premiers ensoleillés. J’avais même laissé mon pull dans la voiture. Tant pis, pour le cimetière, ce serait en t-shirt. Les morts ne m’en voudraient pas.
Le petit groupe s’est rassemblé autour de la bière de chêne clair. La chaleur nimbait la scène immobile. Un rayon de soleil brillait, brûlant, sur le scellé de cire rouge qui semblait sur le point de fondre de nouveau. Un dernier instant de silence. Pour mémoire. Étouffé de chaleur. La main de l’enfant s’est glissée dans la mienne et je l’ai serrée pour qu’elle ne soit pas seule. La cérémonie simple et grave a lentement concentré l’émotion en une substance épaisse qui devenait palpable.
La terre a englouti le cercueil. Les derniers mots d’adieu, solennels et clairs, sont tombés dans la fosse avec une pluie de roses jaune pâle. Les larmes de l’enfant ont ruisselé sur ses joues, sans que nulle parole ne vienne les entraver.
15 mai 2006 à 20:13
C’est très beau.
16 mai 2006 à 11:10
Quelque soit le mois, va savoir pourquoi, la rime à « cimetière », chez moi, reste « hiver ». Sans-doute un réflexe culturel plus qu’un sentiment, une sorte de gris en filigrane, de sépia pavlovien.
17 mai 2006 à 14:20
Pourquoi la mort s’habille-t-elle toujours de larmes silencieuses, d’une douleur indicible, du reflet de notre propre mort ?
22 mai 2006 à 13:43
Je suis venu vous voir avant de partir, y’avait personne ça vaut mieux comme ça, je savais pas trop quoi vous dire, croyez pas que j’vous abandonne même si encore une fois je vous laisse le pire : les larmes qu’on verse sur la mort d’un homme…
Voila, ce texte m’a rappelé les paroles d’une chanson de Mano Solo : « Je suis venu vous voir »
Décidément entre tristesse, tendresse, violence mais aussi gaieté et bonheur, la vie n’est pas simple, ton blog reflète bien cette immense montagne russe, avec ses hauts (très hauts parfois) et ses bas (de vrai précipices parfois), qu’est l’existence, cette engeance.
Bravo Thomas et continue, j’aime beaucoup ton style…
22 mai 2006 à 13:55
Très joliment écrit. Plein d’émotion.
23 mai 2006 à 08:16
tout de même, sans pull, tu as dû frissonner ?
23 mai 2006 à 08:23
Très bien écrit, très juste. Ca me rappelle une promenade au Père Lachaise un dimanche d’avril, en plein coeur d’une séparation, qui est une mort aussi…
23 mai 2006 à 22:06
Xian, il faisait vraiment chaud ce jour-là.
Polluxe, si seulement pour les séparation on savait un rituel semblable à celui-là, sans doute pourrait-on les rendre plus supportables.