Électron périphérique
Arrivé à Lyon par le train du matin, bondé à l’orée du week-end prolongé, je les avais rejoints pour déjeûner, puis nous nous sommes mis en route pour la maison familiale, perdue dans la campagne, isolée au point qu’il y faut mille acrobaties subtiles pour trouver le lieu et l’orientation adéquats chaque fois qu’on veut utiliser son téléphone mobile.
Nous allions être ensemble quatre jours, retrouvailles des copains, dix ans déjà qu’on fait les quatre cents coups. Ensemble. Eux naturellement s’assemblent, s’agencent, me semblent trouver chacun intuitivement son rôle, sa fonction. Machine qui glisse presque sans bruit, cliquetante, onctueuse comme le doux glissement d’une mécanique fine. Merveilleux orchestre des grégaires qui savent vivre en parfaite symbiose, qui l’ont appris tandis que je n’ai jamais su que graviter autour du noyau, à plus ou moins de distance, singulier, attaché et éloigné à la fois.
Les uns s’occupent du barbecue, les autres en cuisine concoctent des sauces succulentes, d’autres encore prennent un apéro bien mérité au retour des courses matutinales.
Au milieu d’eux je me débats, je m’agite, je m’épuise à chercher comment prendre part à cela. Je désespère de ce sentiment d’inutilité profonde. Et ce n’est qu’à la nuit noire, dans le silence de la maison endormie, que je trouve enfin une place. Je range les derniers verres, la bouteille presque vide de vieux malt, je m’assure que ceux qui dans quelques heures se lèveront tôt trouvent une table propre et vierge. Farouche et solitaire, je n’existe que seul au cœur de la nuit.
1 juin 2006 à 07:54
Etrange….
1 juin 2006 à 08:51
(J’aime beaucoup la première phrase… l’ambiguïté un peu surréaliste de l’apposé « bondé »…)
Pas toujours simple de se sentir à sa place… même parmi des gens que l’on apprécie.
1 juin 2006 à 14:32
Ils sont nombreux les serviteurs inutiles de la nuit, plus nombreux qu’on ne le pense.
Et contrairement à ce qu’on peut penser, ils ne sont pas forcément les plus malheureux.
1 juin 2006 à 15:10
Oh oui je la connais trop bien cette vie d’électron libre….Et si ce n’est par choix, elle a parfois ses avantages!
1 juin 2006 à 17:04
Hmm, un solitaire qui recherche tout de même la compagnie humaine…
Ambivalence, quand tu nous tiens, hein ?
1 juin 2006 à 18:58
ben moi je trouve que c’est pas si mal la place de l’electron libre
J’aime bien les « gens de l’ombre ».
Celui/Celle qu’on surprend attelé à leur discrete tache, avec qui on peut siroter un fond de bon vieux whiskey en refaisant le monde pendant que les autres dorment sagement.
:o)
1 juin 2006 à 20:58
Je rêve ou je viens de me faire traiter de grégaire par monsieur « zut mon mobile capte pas je vous pique le téléphone fixe un quart d’heure » ?
Amis (autres) lecteurs, désolé de casser un mythe, mais Thomas n’a pas joué au justicier solitaire de la nuit pendant tout le week-end. On l’a aussi vu se faire captiver dans l’une ou l’autre partie de l’un ou l’autre jeu, et discuter longuement du vieux malt (pardon, des vieux malts) avec celui qui avait fourni celui susmentionné, et boire des apéros, et tout ça. Et s’il joue encore les Batman l’an prochain, on recommencera, non mais !
2 juin 2006 à 10:19
Roland,
s’il veut continuer à lever des belettes il faut bien qu’il entretienne ses trolistes hypostases antinomiques de Lorenzo Lamas impénétrable, Rimbaud indomptable et Weird Al éthylique maltais :)…
Est-ce que tu l’as tanné à Jungle Speed ( je ne veux pas savoir qui lui tenait le totem 🙂 ) ou une partie d’épilation post-épulatoire ?
2 juin 2006 à 12:52
Éric, je me permets à toutes fins utiles de te rappeler que moi non plus, je ne suis plus célibataire, et que par conséquent continuer à lever des belettes ne fait pas partie de mes projets d’avenir pour le future visible.
Et sinon, on a joué aux Aventuriers du rail (et au Mao), et c’était vachement bien. Même que j’ai gagné. Une fois.
Melie, et si je recherchais la compagnie de quelques individus particuliers, plutôt que celle d’un groupe ? (Et sinon, oui, je suis plein de contradictions, comme plein de gens !)
2 juin 2006 à 14:10
On sent que la gazelle risque de laisser divaguer innocemment ses habitudes internautiques sur ce blog hospitalier pour que tu montes indigné-effarouché à la tribune éteindre les fumées sans feu d’une intervention qui ne fleurait que le second degré en partant de la gauche.
Forcément t’es toujours premier dès qu’un jeu évoque le sino-prolétariat exploité par le développement du rail – durable ? 🙂 – simplement parce qu’ils n’avaient encore aperçu la lumière incarnat du salut communiste au bout de leur tunnel d’oppression :)… Tu peux te pousser un tantinet sur le côté ? Tu occultes mon vendredi visible qui ne formera qu’un le lundi du même nom :)…
2 juin 2006 à 17:50
Abstraction faite des commentaires amusés de tes proches, je reste accroché à l’atmosphère du texte dont une partie me fait t’envier, dont une autre mais très familière.