1989, année 12 — Révolutions
C’est l’année du bicentenaire. Dès le début de janvier, ça commence par un beau timbre bleu et rouge avec des oiseaux de Jean-Michel Folon. À cette époque je m’occupe encore assidûment de ma collection : il figure en belle place sur la page thématique « Révolution française » de mon album. Je réserve aussi une étagère de ma chambre aux divers memorabilia glanés au long de l’année, avec en fond une Marianne que j’ai décalquée. Et tant pis pour l’anachronisme s’il s’agit en fait d’une Liberté de Delacroix, égérie des barricades de 1830. Je négocie dur pour qu’aux premiers jours de juillet on puisse rester encore un peu à Paris, au lieu de partir tout de suite à la campagne. Ainsi je peux visiter PhilexFrance, le grand salon phlatélique, j’ai mes cachets spéciaux « Premier jour » sur le bloc-feuillet Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, je suis aux anges.
On rejoint donc la campagne. Une idée révolutionnaire elle aussi est sur le point d’infléchir un bon bout de ma vie. Avec les amis qu’on retrouve là-bas à chaque période de vacances, trois familles, six gamins, on va monter une pièce de théâtre. C’est Mickaël qui a eu cette idée brillante, probablement sans soupçonner (sans que je soupçonne moi-même) dans quoi il m’embarquait.
On a choisi un texte court, bien sûr, mais c’est quand même une vraie pièce : le Médecin volant de Molière. Au boulot ! On bosse sans compter, il faut apprendre nos textes, trouver des costumes et des décors en fouinant dans les malles et les granges des uns et des autres, imaginer une scène en plein air. Répéter jusqu’à ce que ce soit fin prêt, disposer la rangée de chaises du public, rameuter parents et voisins, et donner nos deux représentations. Franc succès. Le nouveau caméscope du grand-père immortalise le spectacle, et je crois qu’une cassette dort toujours aujourd’hui quelque part en banlieue.
Mes tout débuts sur les planches. Une histoire qui dure depuis dix-huit ans.
Douze de trente petits cailloux.
16 juillet 2007 à 17:03
La cassette ! On veut la cassette ! Disons même « ma cassette », c’est plus approprié.