Draguer en soirée
N. m’a fait l’amitié de me convier à la grosse soirée Austin Powers, alors on est arrivés vers vingt et une heures, ce samedi, dans le grand appartement. Trois cent vingt mètres carrés à deux pas de la Madeleine, parquet, moulures, vitraux Art nouveau et déco tendance sixties. Une bouteille de champagne pour deux. Mes nouvelles lunettes en plastique à paillettes et les baskets qui brillent sont parfaitement dans le ton de la soirée.
Je ne connais personne ce soir. Ah, si, peut-être celle-ci en mini-robe brillante. Il me semble que je l’ai déjà vue… J’en aurai le cœur net.
— Excuse-moi, tu fais quoi dans la vie ?
— Heu, je suis avocate…
— Ah, je me disais bien que je t’avais vue en Berryer !
Nous discutons un peu, et puis je retourne sur la piste. Éclaboussé par les lumières multicolores, je bouge mon corps en rythme. Je me lâche totalement, personne ne me connaît ici (à part N. mais je crois que me voir m’amuser avec insouciance la fait plus rire qu’autre chose). D’une partenaire à l’autre je révise même quelques passes basiques d’un rock’n’roll rouillé.
La disco fait boum, boum et j’ai posé ma coupe pour avoir les mains libres. M. danse en face de moi et ses yeux dans les miens me sourient, alors je m’approche. Ma main sur ta taille, ma main sur sa main, emportés par la musique. Nos corps s’éloignent, se rapprochent, les regards joutent et jouent et se jaugent et les corps se rapprochent encore, son ventre contre le mien, ses seins qui s’écrasent sur moi et son corps chaud sous mes mains contre le mien. Ça tourne, ça vibre, si ça se trouve tout le monde nous regarde, je m’en fous je ferme les yeux pour plonger dans ses cheveux. Contre moi elle ondule et je la serre fort, mes mains glissent sur elle et elle glisse sur moi et mes lèvres s’égarent quelque part dans son cou.
Mes yeux rouverts alpaguent les siens et là on est au bord de la perte de séparation, non on l’a clairement dépassée, je suis dans ta bulle tu es dans la mienne, je suis là tout près tu es là tu es prête ? Non pas encore tu fuis mais tu souris alors je joue au chat… OK tu veux jouer on va jouer, c’est de la disco mais on peut toujours danser un rock là-dessus, je m’éloigne mais je ne lâche pas ta main, un petit tour et ça revient, impact je t’attrape là contre moi, je te prends au jeu et tu te laisses attraper, et là au bord de la piste…
Juste un baiser donné, un baiser chipé, ton corps contre mon corps collé serré mais ensuite s’envoler et me laisser esseulé.
Et puis au dernier slow B. et moi seuls encore sur la piste, alors on se dit on va danser, ‘faut en profiter, c’est fini, tu me dis, non c’est pas encore fini c’est Voilà c’est fini. Et voilà, on fait durer les dernières secondes infiniment lentes. Non, on ne voudrait pas que ce soit fini mais la musique s’arrête et on est désolés. On va se poser. Un fauteuil pour deux, tu me fais une place ? Je love mes bras autour de toi. Confidences papotées en tendresse pacifiée. Tu ne fais pas ton âge, vraiment. Au revoir, à jamais, belle vie à toi loin dans le Sud, puisque tu vas chercher le soleil.
Quatre heures du matin, il pleut sur la Madeleine et je rentre à pieds dans les rues désertes. Seul, fatigué, et quand j’arrive, trempé. Mais ce n’est que la pluie.
25 novembre 2006 à 21:55
Quelle jeunesse, quelle fougue ! Un beau post en tout cas, plein de vie, d’allant et de tranche-de-réel. Mais qui habite dans une 320 m2 à Madeleine ???
27 novembre 2006 à 22:55
J’aimerai bien que l’on me drague aussi sur un rock endiablé…
28 novembre 2006 à 22:43
Comme d’habitude, ce que tu décris le mieux ce sont les scènes de séduction. Et ça fait du bien.
31 août 2007 à 23:54
Mais qui habite dans une 320 m2 à Madeleine ???
C’est moi ! Enfin pour être précis, c’est 345 mètres carrés !
Si vous me trouvez, sonnez, je vous offre un verre (il faudra biensûr que vous me racontiez l’histoire écrite plus haut). Faites le tour des beaux immeubres du coin et regardez les plaques dorées ;=)