Le début du jour
– Comment cela s’appelle-t-il, quand le jour se lève, comme aujourd’hui, et que tout est gâché, que tout est saccagé, et que l’air pourtant se respire, et qu’on a tout perdu, que la ville brûle, que les innocents s’entre-tuent, mais que les coupables agonisent, dans un coin du jour qui se lève ?
– Demande au mendiant, il le sait.
– Cela a un très beau nom, femme Narsès. Cela s’appelle l’aurore.
Le monde est moche. Le monde est dur. La vie est impitoyable. Des mères, des pères et des enfants agonisent tous les jours, lentement par la maladie ou la famine, violemment par la guerre. Chaque jour depuis l’aube des temps, l’homme exerce sa créativité, son génie astucieux, pour inventer la mort de son prochain. Chaque jour est le témoin de la souffrance humaine, de la torture des âmes, « de tout ce dont la chair se déchire et succombe » (Brassens dixit).
Et partout les hommes résistent. L’humanité survit aux guerres, aux pandémies, à la peste noire, aux ouragans, aux doryphores. Les hommes survivent même à la mort des dieux (Nietzsche était à l’enterrement, d’ailleurs). Les individus survivent à la mort de ceux qu’ils aiment, à l’abandon, aux pires violences subies. Des pires cauchemars, ils ressortent plus forts, vivant avec leur passé, mais vivants. Surprenants, merveilleux, ils vivent pour raconter leur histoire, pour témoigner que la vie est bien plus forte. Avec eux, l’un d’eux, j’ai envie de vivre. De profiter de cette chance maintenant, tant qu’il est temps (parce que je ne crois pas qu’il y ait autre chose après). Comme ces hommes et ces femmes qui savent qu’ils vont mourir, je souris à la caméra en regardant l’aurore.
« – Pourquoi tu souris ?
– Parce que je suis heureux… »
10 septembre 2006 à 17:07
[…] Je n’avais rien commandé récemment. Ni pour moi, ni pour le travail. Et d’ailleurs quand je commande pour moi, je ne demande pas de papier cadeau. Sur la petite carte collée à l’emballage argenté, pas de mots. Juste un sourire. :-). À l’intérieur un livre, une histoire belle et tragique dont les tout derniers mots sonnent l’espoir des hommes tant qu’ils demeurent en vie[1]. […]